Compte personnel de formation en euros : que gagnent et perdent les salariés?
C’est un sujet qui fait des vagues : le compte personnel de formation, jusqu’à présent crédité en heures, va désormais être quantifié en euros. A l’origine de cette transformation, la Ministre du Travail, qui souhaite rendre le CPF plus lisible et encourager plus de Français à y accéder.
A la fois défendue et contestée, cette réforme ne laisse personne indifférent. Débat sur le taux horaire, inégalité, transparence accrue… Ce changement bouscule indéniablement le marché de la formation. La question que tout le monde se pose : les salariés vont-ils y gagner ou y perdre?
D’heures de formation à euros : plus de transparence, mais à quel prix ?
Toute cette réforme repose sur un changement « d’apparence » du CPF. D’heures de formations, notion jugée vague et intangible pour les salariés, on va passer à des euros sonnants et trébuchants.
Alors que cette mesure a pour but de créer plus de transparence pour les salariés et entreprises, les partenaires sociaux s’inquiètent cependant de ses contrecoups négatifs – notamment en termes d’inégalité entre les salariés – alors qu’ils viennent justement de négocier de nouveaux accords sur l’augmentation des heures du CPF.
Le nombre d’heures de formation est en effet passé à 35 par an pour un salarié à temps plein, avec une limite à 100 heures. Selon le Ministère du Travail, ces heures seront converties en un budget de formation 500€ par an, avec un plafond à 5000€ par salarié – sauf les salariés « non qualifiés » qui auront droit à 800€/an et jusqu’à 8000€ en total.
Un rapide calcul nous informe que l’heure de formation est ainsi évaluée à 14,28€.
Ce taux semble bas pour certains qui ont peur que cela fasse émerger plus d’inégalités. Dans l’industrie par exemple, les formations nécessitent du matériel technique qui augmente considérablement leur coût.
De l’autre côté, cela permet plus d’égalité entre les branches d’activités et les OPCAs qui les gèrent. Tous n’ont en effet pas le même coût horaire pour une formation. Certains OPCAs sont par ailleurs accusés d’augmenter artificiellement le coût des formations afin de ne pas perdre les financements excédentaires versés par l’Etat – voire de privilégier certains organismes de formation.
Passer le CPF en euros permettra ainsi de se rendre compte plus clairement de ces différences et de limiter les inégalités actuelles.
L’accès à la formation améliorée ?
Plus que la transparence, c’est l’accessibilité au CPF qui souhaite être améliorée par le Ministère du Travail.
Celui-ci a ainsi annoncé la création d’une application mobile qui permettra à tout actif de consulter les formations autour de lui ainsi que le solde actuel de son compte de formation. En effectuant cette transformation vers le digital, le CPF prend un tournant indéniable vers le mobile learning. Plus besoin de passer par l’OPCA ni par l’entreprise : les budgets de formation seront directement collectés par l’URSSAF et le salarié n’aura pas besoin de faire des démarches pour avoir accès à son CPF.
Même si cela facilite considérablement l’accès aux formations, cela signifie également que les OPCAs ne pourront plus abonder, comme elles le faisaient jusqu’à présent. En effet, si une branche d’activité décidait de mettre l’accent sur une compétence particulière par exemple, les actifs qui n’avaient pas suffisamment d’heures de formation pour accéder à une formation pouvait tout de même y avoir droit.
Avec le nouveau système, ce sont les entreprises – voire même les salariés directement – qui devront potentiellement compléter cette différence.
Une inflation à prévoir pour le CPF?
Enfin, le dernier point abordé – et pas des moindres – est celui de l’inflation potentielle du marché de la formation. En libérant ce marché, les syndicats craignent que le coût des heures de formation augmente. De l’autre côté, l’État affirme que cette libre concurrence permettra une meilleure autorégulation du marché, avec une possible déflation pour limiter la casse sur le taux de remboursement. C’est un débat politique bien connu, entre libéralisation et règlementation du marché.
Une chose est sûre cependant : même si ce sujet porte à débat et laisse des questions en suspens, il aura au moins le mérite de faire connaitre le CPF au grand public. Utilisé aujourd’hui par seulement 3 Français sur 10, le but de cette réforme est en effet qu’il soit mieux connu des salariés. En ce sens – c’est donc déjà un succès.
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